Source : Bornes armoriées du Chalonnais
par Louis Armand-Calliat, tome XXIII des MSHAC 1928-1929, p.101-129, extraits pour Demigny et Saint-Loup-de-la-Salle :
Située dans la forêt de Demigny, au lieu-dit la Maleroye, à la limite des communes de Demigny et Saint-Loup Géanges, elle mesure 0,90 m de hauteur, 0,40 m de largeur et 0,30 m d’épaisseur.
C’est une borne à sommet rectangulaire, gravée sur ses deux faces. La face est comporte une crosse tournée à dextre, qui évoque l’abbaye de Maizières et dont le bâton est accompagné de la date MDXL (1540). Sur la face ouest, on voit un écu ovale [d'azur], à trois fasces [d'argent] (armes des Foudras), sans timbre ni supports, avec au-dessous, la date 1785.
L'abbaye cistercienne de Maizières fut fondée en 1132 par Barthélémy, abbé de la Ferté, sur un territoire sis à Saint-Loup et offert par Foulques de Réon. Ainsi naquit la quatrième fille de la Ferté (Gallia Christiana, t. IV, col. 1028 et instrumenta, XXII).
Dès l'origine, les religieux eurent le droit d'usage dans les bois environnants. Foulques de Gergy leur donna plus tard celui de la Mailleroye (boscum Malerii) [Gallia, t. IV, p. 239, Preuves].
En 1255, il y eut un règlement entre l'évêque de Chalon, Alexandre, seigneur de la Salle, et l'abbaye au sujet de cette forêt (ADSL, H. 56).
En 1266, l'abbé de Maizières reconnut que « la forest dicte de la Male Raye était de la haute et moyenne justice de l'évêque de Chalon » (Saint-Julien de Balleure, Antiquitez de Chalon, p. 463.
Au XVIIIe siècle, on leva le plan de la Mailleroye (ADSL, H 79).
La date 1540, gravée sur cette borne, paraît indiquer que celle-ci fut érigée à l'occasion du procès soutenu en 1537 par l'abbaye de Maizières contre Philippe d'Ugny, écuyer, coseigneur de Demigny. La sentence maintint les religieux « au droit, pouvoir et faculté de chasser et faire chasser toutes et quantes fois que bon leur semble, en leurs bois de la Maleroye, à toutes chasses de bestes saulvaiges, à tous engins, arnois et cordaiges, à cors et à cry et en toutes sortes que chasse se peut et doit faire » (ADSL, H 69, n° 18).
La crosse gravée sur la face est de la borne de Saint-Loup n'a pas un caractère héraldique et ne rappelle en rien les armes de l'abbaye de Maizières, qui étaient, sous Louis XIV : D'azur, semé de fleurs de lis d'or, à un écusson bandé d'or et d'azur de six pièces, bordé de gueules (D’Hozier, Armorial général, Bourgogne, éd. Bouchot, t. I, 89). Le bâton recourbé signifie ici « terre d'abbaye », sans plus ; mais il désigne d'une façon suffisamment claire le monastère tout proche. Pareil symbolisme se retrouve à la Ferté et à Lancharre, sur des monuments analogues. »
Les armes de Philippe d'Ugny, l'autre partie dans le procès rappelé plus haut, devaient se voir sur le côté ouest de la borne. Alexandre-Henri de Foudras les fit effacer et remplacer par les siennes en 1785. L'année précédente, il avait fait dresser les plans de la seigneurie de Demigny et fait recevoir plusieurs gardes forestiers (ADSL, B 295).